La bataille historique pour le poste de président de la Chambre des représentants des États-Unis, qui a duré quatre jours et nécessité quinze tours de scrutin, a montré à la fois l’empreinte du trumpisme et la moindre influence de l’ancien président sur le Parti républicain. Il faut aussi s’attendre au retour de ces crises auto-infligées auxquelles les États-Unis nous ont habitués quand un Congrès républicain (en totalité ou juste une des deux assemblées) fait face à un président démocrate : c’est le cas de manière récurrente depuis 1995, date du retour d’une majorité républicaine au Congrès après 40 ans d’opposition, sous la houlette de Newt Gingrich. C’est l’objet de mon dernier article pour Mediapart.
Sur le même thème: cette émission RFI Géopolitique consacrée à la rentrée du Congrès, à laquelle j’ai participé avec mes collègues américanistes Simon Grivet (Université de Lille) et Hugo Bouvard (Université Paris Cité).
Les élections de mi-mandat (midterms) de novembre ont été désastreuses pour Donald Trump, puisque les candidat·es qu’il avait personnellement investi·es, comme Mehmet Oz en Pennsylvanie, Herschel Walker en Géorgie ou Kari Lake en Arizona, ont perdu des élections annoncées comme une « vague républicaine » – qui n’a pas eu lieu. Mais le mensonge sur l’élection de 2020, la présentation du 6 janvier 2021 comme « manifestation politique légitime » plutôt que comme coup d’État manqué, et les guerres culturelles contre un « ennemi intérieur » qualifié de « woke » et assimilé à l’ensemble du Parti démocrate définissent aujourd’hui le Parti républicain et sa majorité à la Chambre des représentants.
La Chambre républicaine ne représente que la moitié du Congrès : ses propositions législatives seront pour l’essentiel symboliques, puisque toute loi doit être votée par les deux chambres dans les mêmes termes. Or le Sénat est resté à majorité démocrate (gagnant même un siège) ; par ailleurs, Joe Biden dispose du droit de veto présidentiel sur toute loi émanant du Congrès.
Mais la Chambre conserve un pouvoir de nuisance par ses prérogatives en matière de surveillance de l’exécutif. Surtout, certaines lois doivent être votées par les deux chambres pour que le gouvernement fonctionne : les lois de budget et le relèvement du plafond de la dette. Or, sur ces deux sujets, Kevin McCarthy a d’ores et déjà promis à sa majorité qu’il exigerait des contreparties radicales en termes de coupes budgétaires : cela faisait partie des conditions de son élection à la présidence de la Chambre.