Le système international face aux guerres civiles: tel était le thème d’un passionnant colloque auquel j’ai participé en avril dernier à Nantes, en excellente compagnie (programme ici). La revue Relations Internationales publie, dans deux numéros spéciaux, les articles rédigés suite aux interventions des uns et des autres, articles que je recommande vivement car le colloque était passionnant de bout en bout. Je présente ci-dessous l’introduction de ma contribution, sur « La communauté internationale face à la guerre de Bosnie. D’une logique multilatérale à une logique de puissances ».

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Dans le cadre de l’interrogation sur le système international face aux guerres civiles, la fin de la Guerre froide semble ouvrir un moment propice. Alors que disparaît l’affrontement bipolaire qui a marqué les relations internationales pendant plus de quatre décennies, le nouveau contexte semble enfin permettre l’existence d’une véritable communauté internationale et faciliter son implication dans le règlement des conflits, y compris les guerres civiles. Cette vision est alors promue par le président de l’hyperpuissance américaine (même si le mot est prématuré), George H. W. Bush père, qui appelle de ses vœux un « nouvel ordre mondial » s’appuyant sur une Organisation des Nations Unies (ONU) enfin capable de fonctionner pleinement, hors des blocages de la Guerre froide.

Les années 1990 ont pu ainsi être décrites comme un âge d’or de l’ONU, qui multiplie les opérations de maintien de la paix à un rythme sans précédent, grâce à un Conseil de Sécurité débarrassé de l’antagonisme entre Washington et Moscou. À cet égard, le conflit bosniaque apparaît comme un cas d’école, et l’ONU y a en effet joué un rôle crucial, mais qui fut loin d’être idéal.

En réalité, l’étude de l’implication internationale en Bosnie, et des étapes qui ont mené à la fin du conflit et à son règlement à Dayton, montre que, dès 1994, la paralysie et l’humiliation de la communauté internationale ont conduit à l’abandon d’une pure logique multilatérale au profit d’une logique de puissances, sous l’impulsion des États-Unis qui y ont vu la seule manière de sortir de l’impasse résultant des divisions transatlantiques et intra-européennes. Au départ pourtant, Washington avait été ravi de déléguer le problème à l’Europe et de laisser l’ONU le soin de gérer la désintégration yougoslave. Mais face à la litanie des massacres de civils et au nettoyage ethnique au cœur de l’Europe, à l’échec des plans de paix successifs, à l’indignation des opinions publiques, à l’afflux croissant de réfugiés dans les pays limitrophes, face également aux menaces sur l’unité et la survie de l’OTAN, l’administration Clinton a fini par revenir à la realpolitik, se résignant à faire évoluer par la force, de manière indirecte, la situation sur le terrain.

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Voir aussi sur ce blog la présentation de mon livre Mourir pour Sarajevo.

MOURIR POUR SARAJEVO